A l’aube de 2026, le paysage cyber connaît une intensification sans précédent. L’année 2025 ayant fait office d’une montée des tensions géopolitiques, une utilisation plus agressive de l’intelligence artificielle dans les attaques et une progression inquiétante de la surface d’exposition numérique. En 2026, les entreprises vont donc devoir composer avec une menace à la fois plus rapide, plus automatisée et plus imprévisible.
Les données issues du rapport ENISA Threat Landscape 2025, fondé sur 4 875 incidents étudiés, permettent de dessiner les tendances fortes qui façonneront l’année à venir.
Cet article vous propose ainsi une analyse approfondie de ces évolutions, ainsi que des recommandations concrètes pour préparer efficacement votre organisation.
Un paysage cyber marqué par l’industrialisation des attaques
Les tendances observées en 2024-2025 montrent une industrialisation claire des modes opératoires. Le phishing reste le vecteur d’intrusion principal, représentant 60% des accès initiaux recensés dans le rapport ENISA (= European Union Agency for Cybersecurity). Cette domination s’explique notamment de part la facilité d’exécution de l’attaque, mais surtout par la sophistication croissante des campagnes, désormais largement bien mieux outillées via l’intelligence artificielle. ENISA note que plus de 80% des attaques d’ingénierie sociale utilisent maintenant un soutien de l’IA pour générer du contenu plus crédible (plus aucune fautes), directement personnalisé pour les différents profils.
Dans le même temps, l’exploitation de vulnérabilité continue d’être un axe majeur d’intrusion, puisqu’elle représente 21,3% des accès documentés. Les attaquants agissent plus vite qu’auparavant : des failles fraîchement divulguées sont exploitées en quelques heures / jours à peine. Parmi ces intrusions, 68% débouchent sur l’installation de malware, venant confirmer l’importance grandissante du patch management comme pilier stratégique.
Autre évolution notable : la forte augmentation des attaque DDoS (= Déni de Service), qui représentent désormais 76,7% des incidents enregistrés. Cette explosion étant principalement due à la montée en puissance du hacktivisme, motivé par l’idéologie ou le contexte géopolitique. ENISA indique que 79,4% des attaques recensées ont ainsi une motivation politique ou idéologique, contre seulement 13,4% pour le gain financier. La frontière entre cybercriminalité, hacktivisme et opérations étatiques s’estompe, avec une convergence des modes opératoires plus fortes que jamais.
L’influence croissante de l’IA : accélération des attaques et automatisation avancée
On ne la définie plus tant elle fait partie intégrante de nos vies désormais, mais l’intelligence artificielle joue un rôle centrale dans la plupart des cyberattaques modernes. Elle permet une automatisation quasi-totale, voir même totale du cycle offensif : reconnaissance, génération de messages, exploitation, contournement des défenses et même exfiltration des données. ENISA observe que les groupes les plus sophistiqués ; qu’ils s’agissent de cybercriminels organisés ou d’acteurs étatiques, utilisent de plus en plus des modèle IA pour optimiser la vitesse et l’efficacité de leurs opérations.
En 2026, l’émergence d’agents IA autonomes constitue un nouvel enjeu majeur sur le marché. Ces systèmes, capables de tester automatiquement des vulnérabilités, d’analyse comportementale défensive, ou encore d’adapter leurs tactiques, représentent une rupture pour la cybersécurité. Les entreprises doivent s’attendre à un niveau d’automatisation offensif bien supérieur à celui des années précédentes, ce qui renforce le besoin d’outils de détection fondés sur l’analyse comportementale.
La supply chain numérique : un multiplicateur de risque majeur
Les attaques visant la chaîne logistique logicielle continuent de prendre de l’ampleur. En compromettant un fournisseur, une dépendance logicielle ou un service tiers, un attaquant peut toucher un nombre massif d’organisations sans efforts supplémentaires. Cette méthode est particulièrement prisée car elle permet de contourner directement des mesures de sécurité internes.
Dans ce contexte, les exigences autour des SBOM (= Software Bill of Materials) deviennent progressivement un standard de protection. Elles offrent une visibilité essentielle sur les dépendances utilisées et permettent de réagir plus vite lorsqu’une vulnérabilité est identifiée dans un composant tiers. Pour 2026, la maîtrise de la supply chain représentera donc un levier essentiel pour éviter des intrusions massives à partir de failles externes.
La menace quantique : un risque encore émergent mais stratégique
Même si les capacités offensives des ordinateurs quantiques ne constituent pas encore un danger immédiat, de nombreuses organisations ne sont pas prêtes à la transition qui s’annonce. Selon certaines études, 48% des entreprises en Europe et en Amérique du Nord ne se sentent pas préparées à faire face à la menace quantique. Avec le paradigme du « harvest new, decrypt later », des données considérées sensibles à long terme (comme des dossiers juridiques, médicaux ou financiers), peuvent déjà être collectées aujourd’hui en attendant une cryptanalyse future.
Pour se munir face à cette menace émergente, nous pouvons supposer que les entreprises vont devoir commencer à inventoriser les systèmes et données qui nécessiteront une migration vers des algorithmes post-quantique. Cette anticipation et essentielle, car la transition PQC (= post-quantum cryptography) sera longue et couteuse.
Des organismes publics de plus en plus ciblés, mais pas seulement
Les organismes publics restent la catégorie la plus ciblée, représentant 38,2% des incidents recensés par ENISA. Cette surreprésentation s’explique par leur exposition médiatique et leur implication dans des tensions géopolitiques. Toutefois, d’autres secteurs connaissent une hausse notable des attaques, notamment le transport et la logistique, les infrastructures numériques, et les systèmes industriels (OT). Secteurs se concentrant souvent sur des processus critiques dont l’interruption pourrait avoir des conséquences économiques majeures.
Par exemple, en septembre 2025, un cyber-incident a affecté le logiciel MUSE, utilisé par Collins Aerospace pour la gestion de l’enregistrement (check-in) et de l’embarquement des passagers.
- Plusieurs aéroports européens (notamment à Bruxelles, Heathrow, Berlin) ont subi des retards et des perturbations à cause de cette attaque.
- Attaque qui démontre comment une attaque IT sur un fournisseur critique peut avoir un impact opérationnel très large sur l’infrastructure de transport : non seulement des systèmes de check-in, mais potentiellement aussi sur l’ensemble du parcours passager.
D’autres organismes souvent attaqués pour des raisons plus financières cette fois-ci concerne les PME, souvent plus petites, avec des budgets moins élevés, leur capacité de défense sont souvent plus légères comparés à de plus grosses entreprises ayant des services de défense dédié, et donc sont plus simples à prendre en chasse pour les hackers.
La protection est de mise pour tous, surtout au vu du développement des attaques et des méthodes de scooting qui sont toujours plus élaborées année après année.
Quelles recommandations pour 2026 ?
Face à ces tendances, plusieurs priorités émergent pour les organisations souhaitant sécuriser efficacement leur environnement. La première consistant à renforcer la gouvernance des identités. Le développement du Zero Trust autour des identités, humaines comme machines, est désormais un incontournable. Il implique des contrôles d’accès renforcés, l’utilisation de solutions de gestion des privilèges (PAM / PIM) et un suivi strict des accès sensibles.
La seconde priorité s’axe sur la détection avancée. L’usage de télémétrie étendue, couplée à des technologies de détection comportementale, permet d’identifier des signaux faibles impossibles à repérer par des outils traditionnels. Les leurres, honeypots et autres mécanismes de déception peuvent également aider à détecter les comportements anormaux générés par des agents IA autonomes.
La gestion des vulnérabilités demeure une pierre angulaire. L’accélération des cycles d’exploitation implique un patch management beaucoup plus réactif, ainsi qu’une exigence accrue envers les fournisseurs concernant la transparence de leurs chaînes logicielle.
La troisième priorité se penche sur la résilience opérationnelle qui devient un impératif central. Les entreprises doivent disposer de sauvegardes isolées régulièrement testées, ainsi que de plans de continuité d’activité construits autours de scénarios de crise réalistes. La formation des collaborateurs reste essentielle, notamment face aux risques d’ingénierie sociale amplifiés par l’IA.
Enfin, la meilleure porte face aux menaces émergences qui arrivent reste leur compréhension, et la formation. Participer à des événements dédiés sur lesquels des professionnels sauront vous expliquer avec des mots simples ce qui est en train d’arriver. Comprendre, c’est savoir quoi faire sans perdre une seule seconde quand l’attaque surviendra, c’est anticiper pour en réduire les risques, et c’est vivre sans avoir à stresser toutes les demi-heures d’un assaut potentiel.
Conclusion
L’année 2026 s’annonce comme une période charnière dans l’évolution de la cybersécurité. Les menaces deviennent plus rapides, plus automatisées, et plus imprévisibles, tandis que les attaquant exploitent massivement l’IA et les dépendances numériques. Les organisations ont désormais la responsabilité d’adapter leurs stratégies, non seulement pour se protéger, mais surtout pour renforcer leur résilience.
Les entreprises qui investiront dans l’identité, la détection avancée, la cryptographie post-quantique et la continuité d’activité seront celles capables de faire face à un environnement cyber en pleine mutation. Le moment est venu de renforcer les fondations et comprendre comment moderniser ses défenses pour anticiper au mieux les ruptures technologiques à venir.
Liens vers l’étude de l’ENISA : ENISA_ETL25_BOOKLET_WEB
